Interview avec Affa : Les pieds sur terre, la tête dans les étoiles

Affa interview

Interview avec Affa : Les pieds sur terre, la tête dans les étoiles

Affa nous embarque dans son univers vibrant où néo-soul, R&B et rap tissent un son unique, hors des codes. La jeune artiste nous parle de son parcours, de sa persévérance et de son dernier projet. Une exploration sonore puissante et sincère, les pieds sur terre mais la tête pleine de rêves, entre l’underground et la superstar vision.

Pour commencer, est-ce que tu peux te présenter ?

Je m’appelle Affa, je suis autrice, compositrice et interprète. Si je devais me décrire, je dirais que je suis une exploratrice sonore et que ma musique est un mélange de toutes mes influences : soul, R&B, un peu de bossa nova, de rumba, de rap aussi. Je n’ai pas envie de me limiter ou de rentrer dans une case, j’ai envie de toucher à tout ce qui m’inspire.

À quel moment as-tu décidé de faire carrière dans la musique ?

J’ai commencé la musique très jeune, mais sans jamais prendre ça vraiment au sérieux. Je n’ai pas grandi dans un environnement de musiciens, dans ma famille, personne ne fait de musique. Par le biais d’une association de mon quartier j’ai intégré un groupe qui allait chanter au FGO-Barbara, un studio d’enregistrement dans le 18e arrondissement à Paris. Je devais avoir 14 ans, j’étais timide et je n’osais pas chanter devant les autres, mais avec le temps je me suis rendu compte que j’aimais beaucoup ça.

Ensuite je me suis concentrée sur mes études, parce que c’est ce que mes parents voulaient. Pendant ma deuxième année de LEA anglais, j’ai rencontré un producteur qui m’avait déjà sollicitée pour un projet de girl band que j’avais refusé. En fait à chaque fois que je voulais m’en éloigner, la musique revenait à moi. Je me suis dit que ce n’était pas un hasard, qu’il fallait que je tente. En 2019, j’ai signé mon premier contrat avec ce producteur. Ça s’est mal passé, et j’ai décidé de me lancer en indé. L’année suivante, j’ai rencontré l’équipe du label Noble avec qui je travaille toujours aujourd’hui.

Comment se fait la rencontre avec Noble ?

À l’époque je travaillais en plus de faire de la musique. J’étais épuisée, je n’avais pas de producteur et pas de moyens financiers mais j’avais envie de trouver une équipe qui partage ma vision. C’est un ami qui m’a conseillé d’aller voir les studios Noble dans le 20e et ça a matché. Au début j’y allais en tant que cliente du studio mais j’ai appris qu’ils cherchaient une artiste et on a commencé à en discuter. J’étais très méfiante à cause de mes mauvaises expériences passées donc je dirai que la vraie collaboration a commencé en 2021 et c’est là qu’on s’est mis à travailler sur mon premier EP Echo.

Justement, comment te lances-tu dans la création de cet EP ?

Le premier morceau que j’ai écrit pour ce projet, c’est “Saudade”. Je revenais d’un voyage au Brésil et je venais de décider d’arrêter de travailler pour me consacrer entièrement à la musique. Je sentais que c’était le bon moment pour me lancer. Ce morceau est arrivé très vite, mélodie et refrain compris, et je l’ai écrit directement en studio. On s’est dit que le morceau était fou et qu’il fallait vraiment bien le produire, avec des musiciens et tout. C’est ce qu’on a fait puis les autres morceaux ont suivi.

Sur Echo, tu cites des artistes comme Erykah Badu ou D’Angelo. On sent une influence très marquée des années 90, d’où ça te vient ?

J’ai toujours aimé la musique américaine. Petite, j’écoutais du rap US et j’ai toujours eu un kiffe pour la langue anglaise. J’ai aussi une grande sœur qui écoutait beaucoup de R&B. C’est elle qui m’a fait découvrir des artistes comme TLC, Destiny’s Child, Mario, Craig David, Ciara, BrandyErykah Badu et la néo-soul, c’est venu un peu plus tard. Mais c’est clair que mon goût pour les 90’s vient de là.

Affa photo 1

Crédit photo: @soboyzz.

Et quel était ton but avec ce premier projet ?

Je voulais être le plus authentique possible, donner un bout de ma personnalité et montrer ce que j’étais capable de faire. C’était mon premier projet, une sorte de carte de visite et je voulais qu’il soit le plus vrai possible.

Ton nouvel EP qui est sorti le 23 mai dernier s’appelle Underground Music, Superstar Vision. D’où vient le titre ?

Il vient de ma vie. Je viens d’un quartier, et mon but est de devenir une superstar. J’ai fait le choix de tout sacrifier pour atteindre ce stade-là, émotionnellement, spirituellement, musicalement.

Superstar Vision, ça peut se comprendre de plusieurs manières : dans le cadre de la musique, mais aussi sur un plan personnel. C’est Affa qui vient d’en bas et qui veut s’élever, en utilisant ses expériences comme bagage. Je voulais mettre en avant la dualité entre l’underground et la superstar, entre le positif et le négatif. Dans la vie, il faut accepter les deux. C’est ça le message derrière le titre.

Et pour toi, être une “superstar”, ça veut dire quoi ?

Ça veut dire atteindre le sommet, mais en restant authentique. Faire de la musique que j’aime sans jamais me trahir. Délivrer des messages qui poussent les gens à s’aimer et à s’accepter.

Je crois beaucoup à l’acceptation de soi et le fait de se battre pour ce qu’on aime, de ne pas s’enfermer dans ce que les gens attendent de nous. Je me sacrifie pour moi, pas pour les autres. Et je veux que ça inspire les gens à croire en eux, à accepter la dureté de la vie et à l’utiliser comme un bagage pour grandir.

L’EP s’ouvre avec “Louanges de Manne” qui est quasiment un titre Gospel. Pourquoi avoir choisi ce morceau comme intro ?

Manne, c’est ma choriste mais aussi une amie très proche. Je tenais à ce qu’elle ait un morceau sur le projet parce qu’elle est importante pour moi. Pour créer cet EP on est partis en résidence au Maroc avec toute l’équipe et le premier soir Manne et moi avons eu une discussion très intense sur nos parcours, nos traumas, notre rapport à la musique. Le lendemain en travaillant sur le titre, c’était évident que ce morceau devait être pour elle et qu’il devait ouvrir le projet.

Comment travailles-tu avec ton équipe lors de ce type de résidence justement ?

On a travaillé non stop pendant six jours enfermés dans une villa sous 47 degrés. C’était intense ! On travaillait tous ensemble : musiciens, choristes, ingés son… Je posais mes mélodies, on ajustait, j’écrivais directement. Tout s’est fait de manière très organique. C’était une expérience incroyable.

Dans tes textes, tu abordes des thèmes très personnels, mais aussi des sujets plus larges comme la condition des femmes. Est-ce que tu peux en parler ?

Avant de rentrer en résidence je me suis posé la question du message que je voulais véhiculer. Avec Echo, j’étais encore un peu timide, c’était une présentation de moi en tant qu’artiste mais je ne disais pas forcément haut et fort tout ce que je pensais. Sur Underground Music Superstar Vision, je dis plus de choses. J’avais besoin d’exprimer ce que je vis en tant que femme, et ce que beaucoup d’autres femmes vivent aussi. C’est important pour moi de prendre la parole, de ne pas me cacher. J’ai choisi d’être artiste pour être moi à 100%.

Un morceau comme “Baby Boy”, par exemple, est une critique assez directe de certains comportements masculins. Qu’est-ce qui t’a donné envie d’en parler de cette façon ?

De manière générale je m’inspire à la fois de mon entourage et de mon vécu. Je suis quelqu’un à qui on se confie beaucoup, donc j’entends plein d’histoires. Mais “Baby Boy” pour le coup c’est personnel, ça fait partie de mon vécu [rires]. C’est un morceau léger, drôle, mais qui dit quelque chose. En fait je suis une bête de meuf, je sais ce que je veux et ce que je ne veux pas et je ne vais pas abaisser mes critères pour un gars qui n’est pas prêt à m’accepter telle que je suis. Voilà et il fait aussi évidemment référence au film du même nom!

Tu as sorti un visuel pour chaque morceau de ce projet. Quelle importance tu donnes à l’image ?

Je mets l’image au même niveau que la musique, pour moi l’un ne va pas sans l’autre. J’aime la photo, la vidéo, l’esthétique de manière générale, et je voulais que les visuels reflètent ma personnalité et ma vision. J’ai insisté pour travailler avec certains réalisateurs, j’ai fait des moodboards pour tous les visuels, c’était un gros boulot. Au final je suis très contente du résultat parce que ça se rapproche énormément de ce que j’avais en tête. La musique c’est quelque chose que tu ressens mais qui n’est pas palpable donc le fait d’ajouter un visuel c’est permettre aux gens de lire ma musique d’une autre manière.

Dans “–300e”, tu parles aussi des galères d’artiste. Est-ce que c’est plus difficile d’être artiste aujourd’hui à l’heure des réseaux sociaux ?

Je trouve que c’est plus intéressant. Ça peut être dur parce qu’on se compare beaucoup, mais c’est gratifiant. Être artiste aujourd’hui, c’est aussi participer à la DA, au visuel, à tout l’univers, ce n’est pas uniquement chanter.

Parfois c’est dur parce que je donne beaucoup de moi, j’ai une vision à laquelle je crois et que je veux partager au monde entier mais qui peut ne pas toujours être accueillie comme je le voudrais. C’est à double tranchant mais au global je trouve ça gratifiant de travailler sa créativité au quotidien.

Est-ce qu’il y a des artistes que tu admires particulièrement pour leur DA ?

J’écoute beaucoup de musique mais j’évite de m’inspirer directement d’autres artistes au niveau des visuels. Ce qui est marrant c’est qu’on m’a parfois comparée à Doechii, à cause de certains visuels peut-être, pourtant nos projets ont été conçus en parallèle et musicalement on est très différentes.

Tu joues à la Maroquinerie le 24 septembre pour ton premier concert solo. Comment tu te prépares ?

Je suis hyper excitée ! On bosse énormément pour créer un vrai show, rythmé et immersif. Je veux que les gens passent un moment fort, qu’ils dansent, qu’ils chantent. On retravaille aussi les morceaux pour le live, avec plus d’instruments et plus de groove. Ça va être génial !


Pour prendre tes places pour le premier concert solo d’Affa c’est ici.

Merci à Affa pour son temps et à l’équipe Noble Paris d’avoir organisé la rencontre.