People Under The Stairs – Sincerely, The P

PUTS cover
Février 2019

People Under The Stairs

Sincerely, The P

Note :

Ils nous l’avaient annoncé cet été, ce nouveau projet sera bel et bien la dernière sortie du duo People Under The Stairs. Un dixième album venant conclure une carrière commencée en 1996 et qui aura fait de ce groupe l’un des plus respecté de la scène underground de Los Angeles.

People Under The Stairs, c’est l’association parfaite de 2 véritables disciples de la culture Hip Hop, adeptes du Do It Yourself arborant à la fois les casquettes de DJ, Beatmaker et MC. Thes One et Double K font partie de cette génération californienne qui s’est installée à la fin des années 90, succédant à un Gangsta Rap en perte de vitesse après la fin de l’apogée Death Row. Aux côtés des crews comme The Pharcyde, Jurassic 5, Hieroglyphics, Living Legends ou encore Dilated Peoples, ils incarneront un renouvellement vital pour la West Coast.

Avant de rentrer dans le vif du sujet en décryptant ce dixième album (et leur douzième projet en tout), on se doit de rendre hommage à la remarquable discographie du duo commencée il y a maintenant 21 ans avec ce premier chapitre intitulé The Next Step (1998). Suivront huit autres albums : Question in the Form of an Answer (2000), O.S.T. (2002), …Or Stay Tuned (2003), Stepfather (2006), Fun DMC (2008), Carried Away (2009), Highlighter (2011) et 12 Step Program (2014). Ainsi que deux EPs venus récemment compléter la collection : The Gettin’ Off Stage, Step 1 (2015) et The Gettin’ Off Stage, Step 2 (2016). Une carrière musicale immortalisée sous forme d’exposition dans le livret de leur album final (illustration de Drew Toonz avec son fameux Emo Cat, à l’origine aussi de la cover de l’album).

The P

Ce n’est qu’un au revoir

Sincerely, The P est la suite logique des deux derniers EPs du groupe, et d’une envie commune de Chris ‘Thes One’ Portugal et Michael ‘Double K’ Turner de se retirer définitivement de la scène rap pour se concentrer à 100% à leurs vies de famille. L’histoire retiendra que c’est à Londres, le 27 octobre 2018, que le duo donnera son tout dernier concert. Ils auront la classe d’attendre que le show soit complet avant d’annoncer cette nouvelle sur instagram, ne voulant pas profiter de l’effet commercial de ce communiqué. Respect !

Pendant plus de vingt ans, ils n’ont cessé d’arpenter les scènes du monde entier et c’est logiquement avec le morceau « Encore » que s’ouvre donc ce dernier projet du groupe. Une façon de commencer par la fin avec un dernier rappel qui débute par un extrait live de leur morceau référence « San Francisco Knights », présent sur leur première sortie The Next Step (1998). Un échange aussi énergique que bref entre les 2 MC’s qui rappelle à quel point l’alchimie entre Chris et Mike est le ciment de ce duo.

The opposite sound dominates the soundscape

But we been breaking breaks while Drake manscapes

Passée cette introduction, sur « Reach Out » le groupe rend hommage à tous ses fans qui sont venus les soutenir à chacune de leurs apparitions à travers le monde. Une vie de nomades souvent loin de leur ville natale de Los Angeles comme ils le racontent sur « Let The Record Show ». L’un des premiers moments fort de ce projet sur lequel on retrouve un interlude faisant référence une nouvelle et dernière fois à leur station de radio fictive WRLA et à ses savoureux jingles chantonnés. Le titre « Hard » est l’occasion de rendre hommage à un style de Hip Hop qui a pris de l’âge mais qui reste toujours aussi kiffant quand c’est exécuté de la sorte.

Ambassadeurs d’un certain Hip Hop

Difficile de ne pas y voir une prise de position écologique avec leur morceau « The Effects of Climate Change on Densely Populated Areas » retraçant une étouffante vague de chaleur dans leur cité de Los Angeles, les climatosceptiques apprécieront ou pas ce scénario. « The Red Onion Wrap » et « Redeemer » sont l’ADN même du style PUTS, de quoi s’ambiancer une dernière fois comme il faut sur quelque chose qu’ils maitrisent parfaitement. Même sanction avec le prenant « Streetsweeper » conclu par cette déclaration d’amour à L.A., une ville à l’énergie si particulière. Une nouvelle fois, avec « We Get Around », on suit les aléas du duo en tournée qui pour l’occasion ont eu la bonne idée de reprendre habillement le « I Get Around » des Beach Boys rendant l’intégration de ce sample quasi naturelle.

Le up tempo de « Stars In The House » offre aux 2 rappeurs un exercice de style dans lequel on les a rarement entendu. Le résultat est une ambiance planante sur laquelle la fille de Thes One les rejoint (au micro et à la guitare). « Here, For A Good Time » est sans aucun doute le morceau qui incarne le mieux pour moi l’esprit de ce duo et de leur dernier projet. Du Hip Hop plaisant qui fait remuer la tête de la première à la dernière mesure, du pur plaisir ! Avec « Letter To My Son », morceau solo de Thes, c’est cette fois-ci son fils qu’on peut entendre au saxophone sur ce titre retraçant la construction incessante d’un rôle de père de famille en parallèle d’une carrière musicale très prenante.

Souvenirs, Souvenirs

« Family Ties » sample le générique de cette sitcom du même nom des années 80, le moment parfait pour rendre hommage à leurs familles respectives et rappeler l’importance de leurs proches au quotidien. « Dream Sequence ’88 » retrace brièvement cette période fondatrice du Hip Hop qui a engendré leurs vocations, laissant ensuite la place à une longue plage instrumentale préparant le terrain pour le dernier morceau de ce dernier album.

They say the cousin of death is sleep

That’s why me and the homie keep beats in the street

« The Sound of a Memory » sera donc la dernière page qui refermera définitivement leur discographie. Une ultime performance sous forme de témoignages et de dédicaces à leurs influences dont certaines ne sont plus là aujourd’hui, allant de James Brown à Big L, d’Aretha Franklin à Sean Price, en passant par Phife Dawg, Jam Master Jay et Prodigy.

Sincerely, The P est peut être finalement la meilleure façon de découvrir ce duo pour ceux qui ont quelques carences de ce côté là. Dans un second temps, il sera aussi bon de remonter le temps avec leurs précédentes sorties listées un peu plus haut. Je n’en garde que de bons souvenirs. Pour conclure, on a droit à un dernier album réussi, à la hauteur de l’événement, et il semble qu’un dernier gros MERCI soit de rigueur pour accompagner cette virée finale du duo sur fond d’un petit peu de nostalgie.