Nemir – Nemir

« On y est enfin ! Merci pour votre énorme patience », voilà ce qu’on peut trouver dans les remerciements de l’album de Nemir. De la patience il en fallait pour les plus grands fans du rappeur de Perpignan qui a travaillé pendant de longues années sur son premier album. Déjà 7 années de passées depuis l’EP Ailleurs. Nemir avait tout de même donné aux fans de quoi patienter en lâchant l’EP Hors-Série l’année dernière. Cette longue attente a forcément nourri de grands espoirs chez certains et semé le doute chez les autres mais le produit final est-il à la hauteur des espérances ?

Némir, par Némir, pour Némir.

A l’image de ses précédents opus, Némir dévoile un album très personnel, aussi bien dans son contenu que dans sa conception. Il s’est entouré de ses amis En’zoo et Gros Mo qui ont participé à l’élaboration du projet. Des amis qu’il remercie chaudement dans les crédits de l’album et sans qui ce projet n’aurait sûrement pas vu le jour. Un choix réussi qui vient appuyer un peu plus le fait que la connexion Perpignanaise peut produire de pures merveilles, comme ils l’ont déjà prouvé par le passé. On retrouve également des collaborateurs de longue date tels que Alpha Wann (qui faisait déjà une apparition sur Ailleurs), ou encore Nekfeu et S.Pri Noir. Cela montre que Nemir privilégie avant tout les featurings sur la base de l’alchimie et l’entente. On sent qu’il a pris le temps de constituer un album qui lui ressemble sur lequel rien n’est forcé.

Le combat le plus dur c’est celui qu’on livre contre soi-même

Nemir se présente au naturel, à travers des textes décomplexés dans lesquels il n’hésite pas à s’ouvrir au public. On y découvre ainsi certaines facettes très personnelles du rappeur perpignanais, ses difficultés face à la production de cet album : « Après la signature j’ai senti monter la pression (…) On m’arrête, harcèle, assaille de questions » comme il le confie sur « Favela ».

Des difficultés et un certain manque de confiance dont Nemir nous avait fait part lors d’une interview. Comme il le dit sur « Minimum »: « Le combat le plus dur c’est celui qu’on livre contre soi-même ». Nemir fait aussi de belles déclarations d’amour à son quartier sur « Saint-Jacques » et dédie également un morceau à sa mère avec le superbe « Loin Devant ». En rappant à coeur ouvert à propos de ses joies et ses faiblesses, Nemir joue la carte de la sincérité, bien loin des délires ego trip.

Diversité et cohérence

La singularité de ce projet s’exprime aussi à travers une grande liberté dans les morceaux. Tout en restant très mélodieux, aussi bien dans les productions que dans le rap/chant de Nemir, l’album mêle différents horizons à l’image des singles « Ça Sert », « Sur Ma Vie » ou « Des Heures ». Le rappeur a d’ailleurs fait le choix de conserver sur l’album les singles qui étaient sortis il y a déjà deux ans pour certains, témoins d’une volonté d’affirmer sa direction musicale.

Mais quelle est cette direction ? Nemir oscille entre les titres rappés, en invitant notamment des rappeurs tels que Alpha Wann, Nekfeu ou S.Pri Noir, puis les tracks chantés, beaucoup plus légères sur lesquelles il est bien sûr accompagné de son acolyte Gros Mo (en featuring sur « Elle M’a Eu » ou sur les refrains et les backs). Certains pourraient critiquer l’aspect pop de certains morceaux cités précédemment mais ceux-ci ne dénotent pas du reste de l’album et viennent au contraire s’inscrire dans un ensemble à la fois cohérent et varié.

Les productions viennent forcément participer à la versatilité de cet album. En’zoo dévoile sa palette de beats large et diversifiée comme il avait pu le faire sur l’album de Gros Mo en 2018. Les titres alternent entre productions plutôt ensoleillées et dansantes à l’image de « Rock’N’Roll » et son beat uptempo entraînant ou « Saint-Jacques », et les tracks plus sombres, plus lentes telles que « Ça Sert », « Favela » ou « Chant Sacré ». En’zoo a ce don pour magnifier les refrains grâce à des sonorités légères et mélodieuses qui transportent l’auditeur comme il le fait sur « Biomen » ou « Rock’N’Roll ». Les productions de l’album ont quelque chose d’intemporel, surtout quand on sait que certains titres datent d’il y a plusieurs années.

L’attente fut longue, mais on peut dire que Nemir a su livrer un premier album de qualité et qui saura plaire aux fans du rappeur perpignanais. Après avoir attendu sept ans, nous allons pouvoir prendre le temps de digérer et apprécier cet album comme il se doit.

Sébastien Laurent

Voue un culte à MF DOOM. S'intéresse au rap des bas-fonds, celui dont on ne parle pas assez. Un soupçon de technique dans l'écriture et un beat sombre font son bonheur.

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