Les rêves lucides de Danitsa

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Les rêves lucides de Danitsa

Ces derniers mois furent pour le moins animés, voire carrément mouvementés pour Danitsa et son entourage : auteure d’un premier album (Ego) salué par la critique, réalisant les premières parties d’artistes comme Princess Nokia ou Ibeyi, jusqu’à sa consécration comme meilleure artiste aux Swiss Music Awards en Février dernier. Force est de constater que les choses se passent (bien) pour la jeune artiste Genevoise.
En attendant de conquérir le public anglophone du grand ouest de sa voix et de son style si particulier, elle est actuellement à la tête d’un Ego Tour comptant plusieurs dizaines de dates sur notre bon vieux continent. De passage à Paris pour l’une d’entre elle, c’est accompagnée de DJ Oni et de sa bonne humeur communicative que nous avons pu nous entretenir avec elle.

The BackPackerz : Tout d’abord félicitations pour ton prix Best Act aux Swiss Music Awards, j’imagine qu’il y a pas mal de choses qui ont changé…
Danitsa : Oui, depuis ce prix j’ai beaucoup plus de demandes pour des concerts en Suisse et même en France. On me reconnait dans la rue et j’ai beaucoup de personnes qui m’abordent pour me féliciter. Je me suis fait interviewer par la RTF, la chaine nationale Suisse regardée par tout le monde là bas.
J’ai entendu dire que tu avais pas mal de rêves Américains, à quand le feat avec Kendrick ?
(Rires) Oui ça fait partie de mes rêves ! Après on dit que les rêves il faut toujours les garder pour soi… Mais moi, je chante en anglais donc c’est sûr que mon but est de toucher un public anglophone et les States font partie d’un de mes rêves. J’ai plein de rêves, mais celui-ci fait partie de mes priorités !
Donc déménager un jour à New York…
Ah oui, si un jour je fais ça, je suis la femme la plus heureuse du monde ! (Rires)
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Vers quoi on a envie de se diriger après un album comme Ego ? Tu disais que tu souhaitais revenir à quelque chose de plus chanté.
En fait pour le deuxième album, je vais surtout m’écouter, et pour l’instant je fais ce que j’aime. J’ai travaillé comme ça pour Ego : j’avais des prods qui me plaisaient et ensuite suivant si j’avais des frissons ou pas, je décidais de poser. Pour le deuxième album, je vais marcher un peu comme ça, je vais me faire plaisir. Mais pour l’instant je n’ai pas encore reçu d’instru qui me parlaient. Donc j’attend. J’attend de trouver mon style, j’attend de trouver ma voie, mais si l’envie me prend de rapper, de chanter, ou de tenter d’autres expériences vocales, je le ferai !
Toujours avec Vie d’Ange (ndlr: son producteur) aux manettes ?
Oui ! On s’entend super bien, on s’est trouvé musicalement et humainement parlant, on se fait mutuellement confiance donc on va continuer à travailler ensemble.
Je voulais revenir sur le cheminement qui t’as mené à ce premier album. Comment on passe de ce reggae bon enfant un poil impersonnel de ton EP Breakfast à cet Ego très marqué Danitsa justement ?
En fait en Suisse, il y a un mouvement qui est train de prendre de l’ampleur, notamment grace à SuperWak. Il y a quelque chose qui est en train de changer dans l’esprit des gens, il y a un renouveau. Les gens ont besoin de fraicheur, et pour moi qui habite à Genève, j’ai ressenti cette vibe. Et j’ai voulu apporter de cette énergie dans ma musique. J’allais beaucoup dans les soirées Hip-Hop, trap et ce son me parlait en fait. J’avais envie d’un son similaire mais à la fois authentique.
T’as mis du temps à le trouver ?
Ouais ! Le premier son que j’ai enregistré pour cet album était « Signs », qui est un son bien plus électro que les autres. Après je suis partie sur « Remember Me » et avec ce son je me suis trouvée ! A partir de là, je me suis dit : « C’est ça ! C’est ça que je veux faire ! »

Tes parents t’ont donné une culture musicale large, du jazz, de la soul, du funk, du reggae, etc. Comment on arrive à créer une recette musicale avec du goût, de la cohérence, quand on doit composer avec tant d’ingrédients différents ?
Justement quand je fais de la musique, je ne choisis pas, je me laisse aller. Je marche beaucoup aux frissons. Après suivant le feeling je vais me dire : « Tiens à ce moment là je vais chanter, ici je vais rapper, là je vais faire une voix un peu plus sensuelle… » Mon esprit me guide, en fait.
Tu disais dans une autre interview qu’au début tu chantais plus pour tes copines que pour toi. La musique c’était un plan B au départ ?
A la base je voulais être soit comédienne, soit journaliste. Je chantais pour mes copines c’est vrai. Il y a mon père qui est compositeur qui s’appelle Skankytone, qui est aussi ingénieur du son. Au départ je chantais pour mes potes ou pour mon père. Mais je trouvais que je chantais pas bien. Et mes amis m’ont donné confiance en moi. Il y avait un concours de musique à mon école et ils m’ont dit : « Vas y, va t’inscrire, tu chantes devant les 500 personnes de l’école et puis tu verras ce que ça fait. » J’ai participé à ce concours et j’ai vu que les gens avaient ressenti des choses, des émotions. Je me suis rendue compte que j’avais partagé mon amour pour la musique. A partir de là, je me suis dit que rien que le fait de donner au gens c’était le plus beau des cadeaux donc j’ai décidé de continuer.
Ton frère fait partie de tes plus fidèles alliés, tant dans ta carrière que sur scène. Les relations fraternelles peuvent être parfois compliquées…
Ca se passe hyper bien, et d’ailleurs ce qui est bien c’est qu’il passe sa crise d’ado avec moi. Il est train de vivre un apprentissage avec sa soeur, il est tous les weekend avec moi. En fait il est tout le temps avec moi : à la maison et sur scène ! Parfois c’est dur mais heureusement on a DJ Oni qui est là pour…
Faire le papa ?
Voilà c’est ça !
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Je suis retombé sur une séquence du documentaire de Julia Lellouche où ton frère fait écouter un de ses sons à ta mère. Est-ce qu’on va avoir droit à un featuring soeur, frère, père ?
Pour l’instant mon frère vient de se lancer dans le rap, il a sorti deux-trois sons sur youtube, je pense qu’il a beaucoup à apprendre, donc une fois qu’il saura vraiment maitriser son art, pourquoi pas ! Mais je pense que ça se fera dans quelques années.
D’ailleurs cette séquence Confessions Intimes est bien drôle !
Celle où il se fait chicoter par ma mère ? (rires) Il avait quinze ans quand il a enregistré ce son, nous on vit à Genêve avec ma mère, ma soeur et moi même, donc il est entouré par des femmes et quand j’entends des insultes dites par mon frère, ça me fait mal. Après je suis grande consommatrice de rap et tous les jours, j’entends des grosses insultes concernant les femmes, mais quand ça vient de ton petit frère non ! Surtout qu’il a pas été éduqué comme ça !
Comment se passe ton Ego tour ?
C’est ma première grosse tournée. Là j’ai soixante-dix dates en France, en Suisse et en Espagne. Pour l’instant ça se passe hyper bien, on tourne en famille. Je suis avec mon frère, DJ Oni, et le tour manager, donc on est 4 sur la tournée, on fait que se taper des barres. Y’a aucune prise de tête. On fait nos concerts et on se marre quasiment tout le temps.
Tu as récemment fait la première partie d’Ibeyi…
Je suis une grande fan d’Ibeyi, alors quand on m’a annoncé que j’allais faire leur première partie j’ai pleuré, vraiment. Ensuite, lorsque j’ai fait leur première partie, c’était aussi la première fois que je les voyais en live. Après mon concert, on est allé les écouter, j’ai eu des frissons, c’était magique. Elles m’ont transmis beaucoup de bonnes énergies. Après j’ai pu un peu discuter avec elles en backstage, c’était hyper cool, j’espère pouvoir revivre des expériences comme ça… tous les jours !
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Va-t-on t’entendre chanter en Français un jour ?
Ouais ! Là j’y pense beaucoup pour le deuxième album, je pense que je vais faire un son en Français. J’ai beaucoup de demandes et même moi je me dis à moi même de me faire confiance et d’écrire en Français. Surtout que je sais le faire , mais c’est juste que j’ai peur de sonner trop R&B.
Et puis c’est toujours assez casse gueule de passer d’une langue à une autre pour un(e) chanteu(se)r…
Ouais, mais tu vois y’a des chanteuses comme Angèle ou Indila, des artistes francophones vraiment récents, qui m’ont vraiment donné envie de chanter en Français, donc oui pourquoi pas…
Quand est-ce qu’on voit inscrit sur un flyer de Coachella : XTRM Tour Starring Danitsa ?
Bah franchement j’aimerais trop ! C’est un de mes plus grands rêves ! Je vais faire un deuxième album pour pouvoir aller aux States et puis même pour pouvoir faire de gros festivals genre Afropunk, ou même Coachella. En tout cas, je vais tout faire pour faire ces festivals. (elle s’arrête)… Et si je ne réussis pas eh bien c’est pas grave au moins j’aurais essayé !

BONUS : le Rap Scan de Danitsa



Crédit Photos : Damien Paillard
Ecoutez Ego le premier album de Danitsa disponible ici