Damso – QALF

18 septembre 2020

Damso

QALF

Note :

« Je vous ai prescrit, en attendant, la mixtape QALF de Damso et Jackpot du groupe OPG / Je vous revois dans quelques heures, reposez-vous, et à toute à l’heure ».

Voici comment se clôture le morceau « Une âme pour deux », et par conséquent l’album Ipséité. 3 ans plus tard, QALF sort enfin. Retour sur la sortie de cet album, décisif pour Damso.

Meilleur d’entre vous tous réunis.

Ah oui.

Voici généralement le type de réaction qu’on obtient après avoir lancé QALF et écouté les premiers morceaux. Comme si Damso voulait présenter ses excuses pour son manque de virulence des deux dernières années. Des grosses punchlines, des lines percutantes. Ce que beaucoup ont reproché à Damso ces derniers temps sont désormais servis. On rajoute à tout cela une touche d’égo trip et des références à l’actualité et l’on fait face à un début d’album qui remplit parfaitement son rôle d’incipit.

On veut voir la suite.

Gros c’est la violence, pas trop de clémence.

Ce n’est pas un nouveau Damso, ce qu’il fait là, il l’a déjà fait, mais ça nous fait grandement plaisir de retrouver une plus grosse touche de haine et des paroles plus crues dans ses sons. Tout cela contraste très fortement avec ses précédentes sorties comme « Oeveillé » ou même la majorité de la tracklist de Lithopédion.

Ce début de projet devrait ravir les fans de la première heure, ceux qui n’étaient pas convaincus par le chemin que prenait l’artiste. « MEVTR » et « LIFE LIFE » illustrent très bien cela. Nous sommes face à des intrus très efficaces, qui laissent Damso s’exprimer et lui permettent de s’éclater dessus. La batterie de Damso paraît enfin rechargée.

On nous propose donc un registre musical qui pourrait nous faire penser à la vibe Batterie Faible. Pour ceux que le flow et le timbre de voix de Damso lassent peu à peu, l’apparition d’Hamza dans l’album sur « BXL ZOO » arrive au bon moment. Ce dernier apporte un vent de fraîcheur et l’association avec Damso est très bonne. L’orientation vers un son type drill permet de prendre une autre direction, très rafraichissante et place cette collaboration comme la meilleure de l’album. On ressent bien la volonté de Damso d’adopter un flow sombre, qui se mêle à la maturité de l’artiste, atteinte avec le temps.

Cependant, au fur et à mesure du projet, le chemin semble bel et bien s’orienter vers quelque chose de plus versatile que ce que l’on pourrait penser.

Gangster tombé love.

L’amour.

Voici une thématique que Damso aborde pratiquement tout du long de cet album. Enfin plutôt, les amours. L’amour désabusé, l’amour triste, l’amour fataliste… (On reste quand même dans une branche sentimentale assez maussade, on ne va pas le nier.).

Et afin d’exprimer au mieux ses sensations, la direction artistique de l’album va prendre une tournure différente. Il s’agira de morceaux plus calmes. Le ton, plus doux. C’est un exercice plutôt habituel pour Damso qui avait déjà poussé la chansonnette plusieurs fois (notamment dans Ipséité ou Lithopédion.). La question étant, est-ce plus réussi ?

On ne pourra pas dire de QALF que ce n’est pas un album personnel. Ce côté intime est une force pour cet album (et est assez réussi la majorité du temps, notamment sur des morceaux comme « ROSE MARTHE’S LOVE » ou « CŒUR EN MIETTES » …).

Il n’est cependant pas parfait. On pense notamment au passage de Lior dans « DEUX TOILES DE MER » qui vous fera sûrement sourire les premières fois mais qui pourrait quelque peu « couper » le morceau après quelques écoutes.

Dans l’ensemble, ce côté personnel et introspectif reste très bien maitrisé. On s’imagine parfaitement à la place d’un Damso impuissant face à l’hospitalisation de sa mère ou encore lorsqu’il évoque ses désillusions sur « SENTIMENTAL »:

Qu’est-ce que j’en sais moi d’l’amour sa mère, 27 ans qu’j’tourne autour du soleil, pourtant, j’n’ai toujours pas vu la lumière.

Like ou Follow ?

Jamais Damso ne nous avait livré un projet aussi hétérogène.

On ne va pas tergiverser plus longtemps, QALF est un très bon album. Très réussi pour ce qui est du côté intime, Damso parvient aisément à retranscrire ses émotions au travers de sa musique. La partie plus nwaar du projet remplit aussi très bien son rôle et rythme parfaitement l’album. Un petit « D’JA ROULE » rafraichit énormément l’album entre tous ces sons plus posés par exemple.

Néanmoins, une question nous reste en tête : est-ce que cela valait tout ce teasing depuis plusieurs années ? Damso laisse en effet planer le suspens sur QALF depuis près de 5 ans et à la sortie nous voici avec un très bon album, peut-être le meilleur (ou du moins le plus complet) de la discographie de Damso mais s’agit-il d’un « classique » comme on pouvait l’attendre ? Sûrement trop tôt pour le dire.

Cependant, quelques semaines après sa sortie, on apprécie fortement l’album à la réécoute, mais ce dernier paye peut-être son attente trop importante. L’album manque de sons très marquants, à la manière d’un « Amnésie » ou « Débrouillard » sur Batterie Faible ou de « Mosaïque Solitaire » sur Ipséité. On dénote aussi quelques morceaux peut-être un peu trop transitoires ou trop peu intenses, comme « POUR L’ARGENT » par exemple. Ce sont des morceaux peut-être un peu vides, qui font un peu « tache » lorsque l’on écoute un projet aussi attendu.

Plus qu’un simple album, QALF est un mythe pour tous les auditeurs de Damso (rien qu’à voir le nombre de théories liées à la date de sortie et à « l’après-QALF ») et c’est peut-être ça son plus gros problème : un très bon album, quelque peu déchu par l’attente grandissante et tout ce qui a gravité et gravite toujours autour.

QALF n’est pas un album parfait, il reste cependant un très bon album que tout auditeur de rap se doit d’écouter. Il est très ouvert musicalement et quelques morceaux se tournent presque vers une vibe plus variet’ comme « SENTIMENTAL » ou « CŒUR EN MIETTES ». On appréciera fortement les sons plus rappés qui nous rappelleront une des qualités intrinsèques de Damso, son don pour la punchline et son phrasé. Le meilleur conseil que l’on pourrait vous donner serait d’aller streamer QALF sans a priori, comme un nouvel album de Damso, vous ne l’apprécierez qu’encore mieux.


Cette chronique est une contribution libre de Julien Ott que nous avons choisi de publier. Si vous aussi vous voulez tenter d’être publié sur BACKPACKERZ, n’hésitez pas à nous envoyer vos articles via notre page de contact.

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